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mercredi 13 août 2014

Les communautés locales, rempart contre la déforestation

POUR lutter contre la déforestation, un rapport suggère de «renforcer les droits des communautés qui vivent dans les forêts», car elles protègent bien mieux leurs arbres des coupes illégales que ne le font les États.

 
 L'Université du Maryland s'est lancé un défi étonnant: suivre «en temps réel» l'évolution de toutes les forêts du monde.

Centaines d'hectares par centaines d'hectares, jour après jour, les forêts disparaissent. Selon les données de la FAO (organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture), elles couvrent quelque quatre milliards d'hectares dans le monde. Et si la déforestation - essentiellement la conversion des forêts tropicales en terres agricoles - ralentit, «elle se poursuit à un rythme alarmant», commente l'agence onusienne dans son dernier recensement (2010). Entre 2000 et 2010, environ 13 millions d'hectares ont disparu chaque année. Le chiffre était de 16 millions dans les années 1990. Outre son rôle primordial dans le cycle du carbone, la forêt représente des écosystèmes très divers et une source importante d'emplois et de moyens d'existence. Dès lors, comment lutter?

Une des réponses se trouve dans le rapport publié par le WRI (World Ressource Institute) et RRI (Rights and the Resources Initiative), deux ONG américaines. Elles ont recensé les études effectuées dans 14 pays abritant les grandes forêts tropicales (Brésil, Indonésie, Mexique, Pérou, Guatemala...) pour voir la différence de déforestation entre les zones sous tutelle des gouvernements et celles gérées par les communautés locales.

Le bilan est sans appel: «Renforcer les droits des communautés qui vivent dans les forêts est une stratégie essentielle pour éviter d'émettre des milliards de tonnes de carbone, pour aider les gouvernements à atteindre leurs objectifs en matière de climat et, enfin, pour protéger les moyens de subsistance de ces communautés.» De fait, les villageois protègent bien mieux leurs arbres des coupes illégales que ne le font les États, qui n'ont bien souvent pas les moyens de financer la surveillance de zones généralement gigantesques.

«Globalement, on estime que 513 millions d'hectares sont gérés par les communautés locales, soit 1/8 de la forêt mondiale», souligne Robert Winterbottom, spécialiste de la forêt au WRI. Concrètement, dans la forêt amazonienne au Brésil, les coupes sont onze fois moins importantes là où elles sont sous contrôle des habitants que dans le reste de la forêt dont la responsabilité revient à l'État. «Dans la partie bolivienne de la forêt c'est six fois moins, au Guatemala c'est 20 fois moins, quant au Mexique et plus précisément dans le Yucatan, c'est carrément 350 fois moins», rapporte encore Robert Winterbottom. Pour obtenir ces résultats, les ONG se sont appuyées sur près de 130 publications, mais également sur dix années de données satellitaires entre 2001 et 2010.

Au Guatemala, les habitants de Carmelita, située au cœur de la réserve de biosphère Maya, protègent bien mieux les 50.000 hectares de forêt de leur communauté que ne le fait l'État, qui peine à surveiller les quelque 21.000 km² que couvre la réserve. «En ce qui concerne la lutte contre le changement climatique, les droits des communautés sur leur territoire doivent donc être inscrits sur la liste des outils indispensables», conclut Jennifer Morgan, la responsable du programme climat et énergie au WRI.

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